Marc Gómez del Moral Guasch v Bankia SA.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:138
Docket NumberC-125/18
Date03 March 2020
Celex Number62018CJ0125
CourtCourt of Justice (European Union)

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

3 mars 2020 (*)

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Contrat de prêt hypothécaire – Taux d’intérêt variable – Indice de référence fondé sur les prêts hypothécaires des caisses d’épargne – Indice découlant d’une disposition réglementaire ou administrative – Introduction unilatérale d’une telle clause par le professionnel – Contrôle de l’exigence de transparence par le juge national – Conséquences de la constatation du caractère abusif de la clause »

Dans l’affaire C‑125/18,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Juzgado de Primera Instancia n° 38 de Barcelona (tribunal de première instance n° 38 de Barcelone, Espagne), par décision du 16 février 2018, parvenue à la Cour le même jour, dans la procédure

Marc Gómez del Moral Guasch

contre

Bankia SA,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président, Mme R. Silva de Lapuerta, vice‑présidente, MM. J.‑C. Bonichot, A. Arabadjiev, E. Regan, M. Safjan et S. Rodin (rapporteur), présidents de chambre, MM. L. Bay Larsen, T. von Danwitz, D. Šváby, F. Biltgen, Mme K. Jürimäe et M. C. Lycourgos, juges,

avocat général : M. M. Szpunar,

greffier : Mme L. Carrasco Marco, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 février 2019,

considérant les observations présentées :

– pour M. Gómez del Moral Guasch, par Mes J. M. Erausquin Vázquez, A. Benavente Antolín, M. Ortiz Pérez et S. Moreno de Lamo, abogados,

– pour Bankia SA, par Mes R. Fernández-Aceytuno Sáenz de Santamaría, F. Manzanedo González, M. Muñoz García-Liñán, V. Rodríguez de Vera Casado, L. Briones Bori et A. Fernández García, abogados,

– pour le gouvernement espagnol, par Mme M. J. García-Valdecasas Dorrego et M. J. Rodríguez de la Rúa Puig, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. S. Brandon, en qualité d’agent, assisté de Mme A. Howard, barrister,

– pour la Commission européenne, par MM. N. Ruiz García et J. Baquero Cruz ainsi que par Mme C. Valero, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 10 septembre 2019,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29), notamment de l’article 1er, paragraphe 2, de l’article 4, paragraphe 2, de l’article 6, paragraphe 1, de l’article 7, paragraphe 1, et de l’article 8 de cette directive.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Marc Gómez del Moral Guasch à Bankia SA au sujet de la clause relative au taux d’intérêt variable et rémunératoire contenue dans le contrat de prêt hypothécaire conclu entre ces deux parties.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3 Le vingt-quatrième considérant de la directive 93/13 énonce que « les autorités judiciaires et organes administratifs des États membres doivent disposer de moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l’application de clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs ».

4 L’article 1er, paragraphe 2, de cette directive dispose :

« Les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ainsi que des dispositions ou principes des conventions internationales, dont les États membres ou [l’Union européenne] sont parties, notamment dans le domaine des transports, ne sont pas soumises aux dispositions de la présente directive. »

5 L’article 4 de ladite directive dispose :

« 1. Sans préjudice de l’article 7, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.

2. L’appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation entre le prix et la rémunération, d’une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d’autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

6 Aux termes de l’article 5 de la même directive :

« Dans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. En cas de doute sur le sens d’une clause, l’interprétation la plus favorable au consommateur prévaut. [...] »

7 L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 prévoit :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

8 Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, de cette directive :

« Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel. »

9 L’article 8 de ladite directive dispose :

« Les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par la présente directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur. »

10 L’annexe de la directive 93/13, qui contient une liste indicative de clauses qui peuvent être déclarées abusives, est rédigée comme suit :

« 1. Clauses ayant pour objet ou pour effet :

[...]

l) de prévoir que le prix des biens est déterminé au moment de la livraison, ou d’accorder au vendeur de biens ou au fournisseur de services le droit d’augmenter leurs prix, sans que, dans les deux cas, le consommateur n’ait de droit correspondant lui permettant de rompre le contrat au cas où le prix final est trop élevé par rapport au prix convenu lors de la conclusion du contrat ;

[...]

2. Portée des points g), j) et l)

[...]

c) Les points g), j) et 1) ne sont pas applicables aux :

– transactions concernant les valeurs mobilières, instruments financiers et autres produits ou services dont le prix est lié aux fluctuations d’un cours ou d’un indice boursier ou d’un taux de marché financier que le professionnel ne contrôle pas,

[...]

d) Le point l) ne fait pas obstacle aux clauses d’indexation de prix pour autant qu’elles soient licites et que le mode de variation du prix y soit explicitement décrit. »

Le droit espagnol

11 L’article 1303 du Código Civil (code civil) dispose :

« Lorsqu’une obligation est déclarée nulle, les contractants doivent se restituer réciproquement les choses ayant fait l’objet du contrat, les fruits produits par ces choses et le prix assorti d’intérêts, sauf dans les cas prévus par les articles suivants. »

12 La deuxième disposition additionnelle de l’Orden del Ministerio de la Presidencia, sobre transparencia de las condiciones financieras de los préstamos hipotecarios (arrêté du ministère de la présidence relatif à la transparence des conditions financières des prêts hypothécaires), du 5 mai 1994 (BOE nº 112, du 11 mai 1994, p. 14444), tel que modifié par l’arrêté ministériel du 27 octobre 1995 (BOE nº 261, du 1er novembre 1995, p. 31794) (ci‑après l’« arrêté du 5 mai 1994 »), disposait :

« La Banque d’Espagne, sur rapport de la [Dirección General del Tesoro y Política Financiera (direction générale du Trésor et de la politique financière, Espagne)], définit par voie de circulaire un ensemble d’indices ou de taux de référence officiels susceptibles d’être appliqués par les entités auxquelles se réfère l’article 1.1 aux prêts hypothécaires à taux d’intérêt variable et publie régulièrement leur valeur. »

13 Le Real Decreto Legislativo 1/2007 por el que se aprueba el texto refundido de la Ley General para la Defensa de los Consumidores y Usuarios y otras leyes complementarias (décret royal législatif 1/2007, portant adoption du texte consolidé de la loi générale relative à la protection des consommateurs et des usagers et d’autres lois complémentaires), du 16 novembre 2007 (BOE n° 287, du 30 novembre 2007, p. 49181, ci-après le « décret royal législatif 1/2007 ») dispose, à son article 8, intitulé « Droits fondamentaux des consommateurs et des usagers » :

« Les droits fondamentaux des consommateurs et des usagers sont les suivants :

[...]

b) La protection de leurs intérêts économiques et sociaux légitimes, tout particulièrement face aux pratiques commerciales déloyales et à l’insertion de clauses abusives dans les contrats.

[...] »

14 L’article 60 du décret royal législatif 1/2007, intitulé « Informations précontractuelles », prévoit :

« 1. Avant que le consommateur ou l’usager ne soit lié par un contrat ou une offre du même type, le professionnel lui fournit, d’une manière claire et compréhensible, les informations pertinentes, correctes et suffisantes sur les principales caractéristiques du contrat, notamment sur ses conditions juridiques et économiques, pour autant qu’elles ne ressortent pas clairement du contexte.

[...] »

15 Aux termes de l’article 80 du décret royal législatif 1/2007, intitulé « Exigences à l’égard des clauses n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle » :

« 1. Dans les contrats conclus avec des consommateurs et des usagers qui comprennent des clauses n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle, y compris les contrats conclus par l’administration publique et les entités et entreprises qui en dépendent, ces clauses doivent respecter...

To continue reading

Request your trial
25 practice notes
  • XZ v Ibercaja Banco, SA.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 9 July 2020
    ...Transparenzerfordernis, das die genannte Richtlinie auferlegt, umfassend verstanden werden (Urteil vom 3. März 2020, Gómez del Moral Guasch, C‑125/18, EU:C:2020:138, Rn. 45 Demzufolge ist das Erfordernis, dass eine Vertragsklausel klar und verständlich abgefasst sein muss, so zu verstehen, ......
  • Opinion of Advocate General Tanchev delivered on 15 July 2021.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 15 July 2021
    ...32), and of 4 June 2020, Kancelaria Medius (C‑495/19, EU:C:2020:431, paragraph 37). 20 See judgment of 3 March 2020, Gómez del Moral Guasch (C‑125/18, EU:C:2020:138, paragraph 21 See judgment of 21 April 2016, Radlinger and Radlingerová (C‑377/14, EU:C:2016:283, paragraph 50). 22 See judgme......
  • Lombard Pénzügyi és Lízing Zrt. v PN.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 31 March 2022
    ...especialmente perjudiciales, que representen para este una penalización (sentencia de 3 de marzo de 2020, Gómez del Moral Guasch, C‑125/18, EU:C:2020:138, apartado 61 y jurisprudencia 42 Pues bien, procede considerar que un dictamen no vinculante de un tribunal supremo de un Estado miembro,......
  • LM v Bezirkshauptmannschaft Hartberg-Fürstenfeld and Österreichische Gesundheitskasse.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 10 February 2022
    ...spetta alla Corte, se necessario, riformulare le questioni che le sono sottoposte (sentenza del 3 marzo 2020, Gómez del Moral Guasch, C‑125/18, EU:C:2020:138, punto 27 e giurisprudenza ivi 34 Occorre inoltre ricordare che, sulla base di una costante giurisprudenza della Corte, il fatto che ......
  • Request a trial to view additional results
28 cases

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT